samedi 8 août 2020

Mousse versus Vague

Il va sans dire que le but de tout surfeur est de longer une vague.

Néanmoins, pour le néophyte, la route vers la "vague verte", celle qui ne s'est pas encore transformée en mousse - ou "vague blanche" - peut être longue et difficile.

Le débutant est généralement tenté de gagner les vagues du fond, même s'il n'a aucune base technique. Comparons ici les avantages et inconvénients respectifs d'un apprentissage dans la mousse ou dans la vague.
Si l'objectif du surfeur est de longer une vague non déferlée, un moniteur de surf lui suggèrera de s'exercer d'abord dans la mousse - qui se forme après que la vague ait cassé - pour acquérir facilement et rapidement les bases de l'apprentissage. Un peu de patience, pour être capable d'évoluer à l'aise au milieu des surfeur plus aguerris, placés au large.

La vague et le débutant

Inconvénients


La difficulté d'aller les chercher : le but des vagues est de ramener tout objet vers le bord, le surfeur dit qu'il "passe la barre" car il lui est difficile de gagner la zone où elles se forment.

Le large : l'individu qui n'a jamais fait de surf va devoir ramer contre les vagues pour aller évoluer dans une zone où il n'a pas pied. Alors qu'il ne maîtrise pas encore la position d'équilibre allongé sur la planche, il va se placer dans une situation d'épuisement physique, être le jouet du courant et d'un élément qui devient de plus en plus aléatoire à mesure qu'il s'éloigne du rivage.

La lecture du caractère aléatoire des vagues : plus la houle est grosse, plus la zone de déferlement de la vague va être étendue. Or, le surf n'est pas juste une histoire de technique, il faut deviner où la vague va creuser avant de se briser et pour l'attraper, être capable de ramer pour arriver au bon endroit au bon moment. Au défi physique de se propulser à la force des bras, va dont s'ajouter la difficulté de lire un élément en perpétuelle transformation. Car une vague casse rarement au même endroit que la précédente.

La difficulté technique : en imaginant que le débutant ait le sens marin ou de la chance et qu'il parvienne à attraper la vague au bon moment, dès que sa planche bascule dans la pente de la vague, il n'a qu'une seconde pour se lever. Pourquoi me direz-vous ? Tout surfeur qui arrive allongé en bas de vague (sauf vaguelette) aura tendance à planter le nez de la planche. Pour éviter de piquer ainsi du nez, il faut se lever entre le sommet et milieu de vague, puis fléchir afin de dévaler la pente.
On imagine combien il est difficile d'apprendre dans l'urgence un geste technique totalement nouveau, ici le take-off. 

Le wipe-out et ses syndromes : lorsqu'il a plusieurs fois piqué en bas de vague, le débutant adopte de lui-même des stratégies défensives qui sont des régressions sur le chemin de l'apprentissage.
Il va conclure qu'il était allongé trop à l'avant de sa planche et adopter une position arrière qui va occasionner une mauvaise position. La planche va alors couler de l'arrière, le nez de la planche pointer vers le ciel et l'engin n'étant plus à plat au contact de l'eau va peiner à avancer. On dit que la planche "pousse de l'eau", ramer va devenir une épreuve de force, exécuter un redressement optimal, ou take-off, est dans ces conditions impossibles. Ce défaut de positionnement va occasionner une cascade de mouvements correctifs qui seront autant de mauvais réflexes, difficiles à corriger par la suite. Tous ces défauts posturaux vont occasionner de la fatigue musculaire mais également articulaire.

Se mettre dans un rapport de force avec l'océan, qui plus est en ayant brûlé les étapes de l'apprentissage, va occasionner de l’écœurement, des blessures ou, pour les plus tenaces, une incapacité chronique à apprendre le surf. Une personne peut ainsi passer dix ans à "surfer" sans maîtriser les bases.

La vague vue de près est beaucoup plus grosse qu'aperçue du haut de la dune : se jeter dans le creux de la vague demande alors un certain engagement psychique, il faut surmonter l'appréhension de la chute. On s'habitue graduellement aux vagues et s'aventurer sans transition dans de grosses conditions peut occasionner du stress. C'est pourquoi une école de surf responsable va garder ses débutants près du bord. Le surf doit être un plaisir, pas une source d'angoisse. Les surfeurs de grosses vagues ont commencé dans des petites vagues comme tout le monde.
Commencer dans les vagues difficiles du large serait comme vouloir apprendre le ski sur une piste noire, qui plus est, une piste qui changerait à chaque remontée mécanique et se transformerait perpétuellement durant la descente.


Avantages


Lorsque les vagues sont toutes petites, elles deviennent accessibles au débutant : elles déferlent près du bord, par faible profondeur, il lui est facile d'aller les chercher à pied, elles sont peu pentues et pardonnent beaucoup d'erreurs.

Des vagues petites et peu pentues permettent d'accélérer l'acquisition des bases du surf et de découvrir rapidement le plaisir de glisser dans la face de la vague.

Néanmoins, il ne faut s'attaquer à des vagues de taille plus conséquente que très progressivement, sous peine d'adopter de mauvaises habitudes : tenir le bord de sa planche, regarder le bas de la vague, s'allonger trop en arrière, faire semblant de ramer, etc. Réflexes qu'il sera par la suite difficile de corriger.


La mousse



La plupart du temps, la première leçon de surf auprès d'un moniteur diplômé d’État fait évoluer le débutant près du rivage. Ceci pour plusieurs raisons :

1. Les grosses vagues intimidantes cassent au large en eau profonde, puis elles roulent jusqu'au rivage sous forme de mousses. Lorsqu'elles arrivent au bord, elles ont perdu de la puissance et permettent une approche graduelle et non violente de l'élément.

2. Les vagues ne brisent jamais exactement au même endroit, il est techniquement difficile d'attraper une vague tandis que les mousses roulent en ligne jusqu'au bord, il est facile de bien se placer pour les attraper.

3. Les débutants attendent les vagues dans une zone peu profonde, ils peuvent se concentrer sur l'acquisition de la position d'équilibre allongé sur la planche, puis de la prise de vague, puis du redressement, en éliminant toutes les contraintes de la mise en situation dans les vagues, à savoir : se propulser uniquement à la force des bras, lutter pour aller au large, dériver plus rapidement, ramer pour se maintenir dans la zone des vagues, ramer, ramer, ramer alors qu'on n'est pas encore capable de s'équilibrer sur la planche, lire les vagues, ramer pour attraper une vague, se redresser en une fraction de secondes. Pour résumer, les mousses, c'est l'équivalent au ski de la piste verte.

4. L'avantage d'avoir pied : les débutants peu aquatiques peuvent se familiariser avec l'élément à leur rythme en restant tout près du bord, de l'eau aux genoux, et s'aventurer plus loin lorsqu'ils se sentent plus en confiance. Le fait d'être près du bord permet de gérer facilement le phénomène du courant puisqu'il suffit de se laisser glisser jusqu'au sable pour revenir à pied dans la zone de surf en face du moniteur ou du point de repère. Il est également plus facile de s'allonger sur la planche que dans une zone profonde où l'on va devoir se hisser sur la planche à la force des bras, battu par les vagues.

5. "Pousse mousse" : il est plus facile de choisir une bonne mousse qu'une bonne vague et de ce fait, la vague blanche est une "machine à vague". Les mousses roulent les unes à la suite des autres, il est possible d'en attraper un nombre incalculable et de répéter les gestes techniques qui permettront de glisser jusqu'au bord et de se redresser correctement sur la planche. Une surfeur au large va prendre une vague lorsque le surfeur au bord aura pris 10 mousses,  le ratio est souvent de cet ordre là.

6. Les spécificités de la mousse : dans la vague, du fait de sa verticalité, le surfer n'a qu'une fraction de secondes pour se lever alors que dans la mousse, il a le temps de s'appliquer et d'acquérir les gestes techniques sans se sentir dans l'urgence. En effet, devant la mousse, la surface de l'eau est plane, le débutant positionné correctement sur sa planche a peu de chances de piquer du nez, il lui est facile de se concentrer sur son redressement. Prendre une mousse permet d'éliminer le stress que peut engendrer le fait de se lever en haut de vague, sensation qui s'apparente, lorsque la vague est creuse, à un petit saut dans le vide.

7. La mousse, première marche pour accéder aux vagues : une fois que le surfer se lève efficacement dans la mousse, qu'il arrive à conserver son équilibre et sa vitesse jusqu'au rivage, il est alors suffisamment habile et en confiance pour s'essayer au take-off dans les vagues (pour peu que la houle ne soit pas trop forte). Ayant automatisé les bons gestes techniques, il sera capable de reproduire rapidement et dans l'urgence, le redressement en haut de vague, sans perdre tous ses moyens.

Ainsi, n'ayant pas brûlé les étapes importantes de l'apprentissage, il pourra se faire plaisir et continuer sa découverte du surf, un des sports les plus addictifs qui existe.

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