Le surf nous vient de nations de langue anglosaxone, on ne s'indignera donc pas que la surfosphère soit bourrée d'anglicismes.
Ces derniers englobent la description du terrain de jeu, des figures et servent même de qualificatifs pour décrire les professeurs de surf. C'est sur ce dernier sujet que nous allons nous attarder, afin de tordre le coup à quelques idées reçues.
Le "surf coaching", marketing ou réalité ?
"Coach" se traduit par "entraîneur" et tend donc à designer une personne qui enseigne auprès d'un public déjà expérimenté, et plus particulièrement à des athlètes de haut niveau inscrits dans le calendrier des compétitions.
Parmi les nombreuses écoles de surf qui fleurissent sur nos côtes françaises, beaucoup d'éducateurs surf se décrivent comme des coachs de surf, ce qui suggère un niveau d'expertise supérieur à celui d'un simple moniteur. Cette démarche vise à attirer un public de surfeurs déjà expérimentés plutôt que de surfeurs débutants. Ces derniers s'attendent à un enseignement d’excellence.
La majorité de ces coachs sont d'anciens compétiteurs, à des niveaux très divers, ce qui ajoute une valeur ajoutée auprès d'un public qui présuppose alors de grandes compétences pédagogiques. Pourtant, il ne suffit pas d'avoir fait de la compétition pour posséder des qualités de pédagogue ; en Australie, des coachs de renom ont un niveau de surf tout à fait modeste, à titre d'exemple. Or, l'Australie est un des trois principaux viviers de champions du monde de surf, avec les États-Unis et le Brésil.
Par ailleurs, vivre exclusivement du coaching de haut niveau est un pari difficile, la plupart des coachs de surf autoproclamés enseignent donc en grande majorité à des publics de niveau débutant à intermédiaire.
A l'instar de leurs confrères qui ne se disent pas "coachs" mais embrassent néanmoins toute la diversité du champ de l'enseignement et notamment l'entraînement à destination d'élèves sachant déjà surfer.
Il convient également de rajouter qu'une fois sorti des centres de formation français, l'éducateur surf n'a aucune possibilité de faire évoluer sa formation vers le haut niveau car aucune formation de niveau supérieur n'est mise en place par le ministère des sports. Or, le "coach" sort des mêmes centres de formation. Sa compétence sera donc intimement liée à son parcours d'enseignant, c'est un pédagogue autodidacte qui a fait évoluer ses compétences tout au long de sa carrière, grâce à des qualités d'observation, d'analyse et de transmission. Au même titre qu'en enseignant lambda.
Vous l'aurez compris, pour moi, ce qualificatif de coach, c'est surtout du marketing même si parmi les coachs, certains se font bien une spécialité de l'entraînement de niveau avancé et possèdent de véritables qualités d'enseignant. Tous les profs de surf sont obligés de se plier au jeu de la loi du marché et de la communication et de saupoudrer leur com de mots fabuleux tels que "surf coaching" (ça sonne plus pro que "prof de surf"), perfectionnement (plutôt que régressionnement quand le prof est vraiment mauvais), analyse vidéo, etc.
Il ne suffit pas de se dire coach ou d'avoir fait de la compétition pour être un bon coach de surf. Pour en avoir le cœur net, l'élève va devoir essayer le coach ! Néanmoins, j'aurais tendance à conseiller un éducateur ayant des décennies d'expérience comme enseignant plutôt qu'un lapin de six jours tout juste sorti de formation. Même s'il est plus joli, qu'il a eu sa photo dans Surf Session Magasine et qu'il fait des vidéos rigolotes sur Tik Tok.
Prof de surf, diversité des profils
Pour choisir dans la jungle des écoles de surf, le stagiaire doit posséder quelques notions. Pour faire simple, il existe deux types de formations pour enseigner le surf :
La formations la plus longue et probablement la plus qualitative : le brevet d’État de surf (ancien diplôme) est devenu le Brevet professionnel de surf, qui est dispensé par les centres de formation dépendant du ministère des sports français (Creps, FFS, Ucpa, etc).
L'ISA est le diplôme international choisi comme diplôme de référence européen, seulement deux semaines de formation, la qualification de l'enseignant va donc dépendre grandement de son profil et de son expérience. Il existe également un diplôme allemand qui se situe entre le diplôme français et l'isa en terme de temps de formation. Les diplômés non français, titulaires de ces diplômes internationaux, sont testées par le ministère de la Jeunesse et des sports pour vérifier leur aptitude à faire évoluer en toute sécurité des élèves dans cet environnement spécifique. Il faut donc s'assurer qu'un moniteur de surf a bien l'agrément de la jeunesse et des sports ou sa carte professionnelle.
Néanmoins, quelle que soit l'origine géographique et la formation des moniteurs de surf, selon qu'ils mettent l'accent sur le commercial ou sur le qualitatif, la qualité de leur enseignement va être fort contrastée : d'où le fameux take-off genou qui s'enseigne encore très fréquemment de nos jours, antidote à toute progression vers un surf d'excellence. Et si tout le monde n'est bien sûr pas capable d'exécuter un take-off dynamique, il est quand même pour le moins curieux d'enseigner la technique du genou par défaut, comme si l'on présumait d'avance de l'incapacité de ses élèves.
Il existe deux approches :
- celle qui consiste à maintenir l'élève dans un état de dépendance absolue vis-à-vis de son enseignant, c'est l'école de la poussette et du take-off genou. Tout seul, l'élève est incapable de ramer pour attraper une vague ou même une mousse. Là, il ne s'agit clairement pas de coaching, on est plus dans la découverte superficielle de la discipline et du milieu aquatique.
- l'autre approche considère que le débutant mérite, autant que le surfeur expérimenté, un enseignement de qualité qui va lui permettre de devenir un surfeur autonome, capable de surfer en toute sécurité (la sienne et celle des autres). Et de devenir un bon surfeur. On ne parle pas de coaching mais d'initiation, pourtant on retrouve ici la même acuité, la même finesse d'enseignement que dans l'entraînement de haut niveau. La pression de la compétition en moins.
Ainsi, le même éducateur surf, qu'il se déclare enseigner ou bien coacher, a besoin d'être compétent dans toutes les phases d'apprentissage du surf, de l'initiation au perfectionnement. Souvent, il enseigne à des surfeurs de niveaux très variés, même si la plupart des surfeurs expérimentés vont faire plus confiance à une école de surf qui se déclare faire du "coaching", parce qu'elle s'appuie sur le prestige d'un ancien compétiteur.
La diversité des coachés
Le surf d'excellence n'a pas besoin des podiums, la confrontation avec des vagues changeantes est déjà en soi un sacré challenge, rares sont d'ailleurs les surfeurs complets, capable de surfer des petites vagues comme d'aller se confronter à des vagues de dimension hors norme.
A part les équipes d'élite, les surfeurs qui viennent prendre des cours de perfectionnement auprès d'un "coach surf" ou d'un éducateur sportif ont généralement des niveaux très différenciés. Souvent, ces surfeurs ont brulé des étapes importantes, zappé quelques bases, et il va leur falloir parfois accepter un léger retour en arrière pour pouvoir repartir de plus belle.
"Il faut parfois reculer pour aller plus loin", Tessa Asamoha.
Bien sûr, l'éducateur peut leur vendre du rêve en leur parlant de leur petit doigt et de la sensation du vent sur le lobe de leur oreille gauche au moment du bottom-turn, mais si le regard, la posture et les appuis sont incorrects, la planche trop petite, la performance sera un objectif impossible à atteindre.
A la Ki Surf School, l'élève doit choisir entre "surfer son égo" ou "surfer la vague", c'est ce deuxième objectif qui va être privilégié par l'entraîneur/prof/coach.
On trouve presque exclusivement sur internet des tutoriels techniques abscons, imprécis, voire régressifs. Au delà de l'emballage marketing, ce qui fait la plus-value d'un entraîneur, c'est son savoir-faire pédagogique, sa capacité à transformer son expérience et son sens de l'observation en contenu théorique, et sa méthode pour transmettre cette connaissance. Dès lors, on comprend qu'il n'ait pas envie de mettre sur internet, en libre service pour ses concurrents, le savoir de toute une vie.
Ce blog essaie de se placer dans l'entre-deux, donner aux surfeurs des clefs pour évoluer, sans pour autant tout dévoiler. Les petits secrets seront dispensés lors d'une séance de surf et pourront être alors, sur mesure, adaptés au surfeur.
Pour conclure, coach, entraîneur, moniteur, prof de surf, peu importe, ce qui va compter, c'est la personnalité de l'enseignant et le contenu de ses cours.