samedi 28 juillet 2018

Foam board versus Hard board

Le mythe de la planche en dur à tout prix


Après l'obsession de la planche la plus courte et pointue possible, il est temps de s'attaquer à une autre gageure : la planche en résine bénéficie d'un prestige qui semble indépassable, mais est-elle vraiment adaptée à l'apprentissage du surf comparé à la planche en mousse ?

Pour répondre à cette question, attardons nous sur les propriétés techniques d'une planche en mousse :

Plus stable


Les planches en mousse sont majoritairement conçues pour des surfeurs en phase d'apprentissage et ont donc des côtes généreuses qui les rendent plus stables. Elles facilitent ainsi le travail du débutant qui, dans ses débuts, ne possède ni les muscles ni la technique nécessaires pour surfer une planche standard peu volumineuse.

De plus, à volume égal, une planche revêtue d'un revêtement en mousse gagne en flottabilité par rapport à une planche en résine polyester. Le surfeur peut donc ramer plus vite, se lever avec moins d'efforts, démarrer de plus loin (pour rivaliser avec les surfeurs plus aguerris ou équipés de longboards) et se lever plus tôt dans la vague, lorsque celle-ci n'est pas encore trop creuse.

Plus sûre


L'argument principal pour utiliser une planche recouverte de mousse plutôt que d'une matière rigide telle que la résine ou le plastique, tient au fait qu'elle soit plus sûre. Là où une planche en dur eut cassé une arcade sourcilière, le débutant qui se cogne à sa planche en mousse s'en tire généralement sans une égratignure. Les dérives sont également molles, lorsqu'une dérive standard sera dure et coupante.

Conscient de cela, il est moins crispé dans les phases d'apprentissage, il s'engage au take-off là où l'anxiété eut induit de mauvais réflexes et par conséquent, il progresse beaucoup plus vite.

Alors que les risques d'accidents augmentent avec l'explosion du nombre de pratiquants, les planches en mousse intéressent de plus en plus de surfeurs aguerris. Effectivement, ces planches faciles à la rame, ludiques et rapides leur permettent de s'amuser lorsque le spot est saturé de monde, sans la crainte de blesser quelqu'un ou d'abîmer une planche en résine à 600 voire 900 €.

De plus en plus performante


Soyons honnêtes, l'esprit des constructeurs de planche en mousse n'a pas toujours été très généreux à l'égard du surfeur débutant. Comme dans les premiers temps de l'apprentissage, le débutant va tout droit dans la mousse, les concepteurs ont longtemps fabriqué des planches certes stables mais au shape grossier, comme taillées à la hache. Vision un peu étroite, qui tend heureusement à s'atténuer.

Car le débutant assidu progresse vite pour aller évoluer dans les vagues, il lui faut alors une planche légère et maniable. Une planche volumineuse peut très bien devenir une instrument facile à manœuvrer, à la glisse agréable, pour peu qu'on respecte le pratiquant. Il suffit alors de calquer sur une planche en mousse le shappe d'une bonne planche en dur. Il est certes plus difficile de travailler la mousse que la résine mais la technique a progressé et l'on trouve à présent sur le marché des planches en mousse convaincantes et qui permettent de réaliser n'importe quelle figure du répertoire surf.

De nombreuses marques de surf, telles qu'Alder, Catchsurf ou Softech proposent des modèles permettant d'accueillir des dérives dures. Une dérive qui ne se déforme presque pas aura d'une part plus de tenue pour empêcher la planche de déraper et d'autre part, un effet rebond intéressant pour le surf radical. Il est à noter que certains concepteurs de matériel technique proposent à présent des dérives dures à bord souple, alliant ainsi technicité et sécurité, ainsi la dérive FYN.

Ce type de produits intéresse les pères de famille ou les profs de surf : avec une 6' en mousse de type Egg, ils disposent d'une planche fun pour les petites vagues et d'une planche sûre pour leur enfant de 6-8 ans ou bien pour un jeune élève qui commencerait à maîtriser en surf.

Il intéresse aussi les bons surfeurs qui ne veulent pas stresser pour leur belle planche sur un spot encombré ou risquer de blesser quelqu'un parce qu'il y a trop de monde à l'eau.

Les pièges à éviter


Acheter une planche trop courte par rapport à son niveau, nous l'avons vu, bloque la progression. En outre, acheter une planche en dur alors qu'on ne maîtrise pas encore les bases du surf fait du débutant un danger, pour lui même et pour les autres.

Les planches en mousse n'atteignent bien sûr pas le niveau de sophistication et de performance technique de certaines planches en résine. Toutefois, ces planches en résine sont optimisées lorsque le surfeur a des muscles entrainés à la rame et qu'il possède de longues heures de pratique, pour ne pas dire des années. Ces planches sont intéressantes pour surfer de manière radicale et explosive ou exécuter des changements de rail et variations de trajectoires les plus fluides possibles.

Bien sûr, être capable un jour de surfer une planche dure en toute sécurité peut être un objectif en soi, mais le surf est un long apprentissage et rien ne sert alors de courir. L'important pour une planche, ce n'est pas d'être un bel objet, mais d'être adaptée au niveau de son utilisateur. Ce n'est pas un hasard si les écoles de surf équipent leur stagiaires avec des planches en mousse, depuis leur première apparition qui date d'une dizaine d'années.

Quand on voit Kalani Rob, ancien champion du tour pro, et ses amis s’enquiller des tubes sur un des shorebreak les plus dangereux au monde, The Wedge, avec une planche en mousse, on peut facilement en déduire qu'une telle planche est suffisamment performante, au minimum, pour un débutant.





dimanche 15 juillet 2018

Quelles configurations d’ailerons choisir pour ma planche, part1




Une description des dérives et de leur fonctionnement, par JF Iglesias, développeur logiciel,  formateur-consultant en aéro–hydro dynamique et inventeur des dérives surf dynamiques, les dérives FYN :

 

Planer dans la vague 

Définir le rôle des ailerons en quelques lignes, correspond à résumer le fonctionnement du manche à balais dans un avion. On appuie sur le côté de l’aileron, ça tourne de ce côté, on appuie sur l’autre côté on tourne de l’autre côté, on appuie devant on plonge et accélère on appuie derrière on remonte et on freine…





Voilà tout est dit, vous pouvez piloter, bon vol et bon surf !

Ce qui est vrai dans une phase de vol, devient faux dans une autre phase, ainsi ne tentez pas d’accélérer en poussant le manche dans une phase de décollage et si le palonnier* n’est pas actionné en harmonie avec le manche cela marche beaucoup moins bien.

*Palonnier : barre horizontale que le pilote d'un avion oriente avec ses pieds et qui sert au braquage de la gouverne de direction pour permettre à l'avion de virer. L'équivalent des transferts d'appui du surfeur, la planche elle-même fait alors office de palonnier.



Si vous avez noté que l’image n°2 contient une erreur (gouvernail inversé par rapport à la description), c’est que vous avez les prérequis d’hydrodynamique et l’esprit critique, bravo. Méfions-nous des descriptions simples qui nous donnent l’impression de tout comprendre et d’être intelligent, voir supérieur au commun des mortels qui s’encombre de détails inutiles. Une description simpliste a certainement un truc à vous vendre, et pas le temps de vous expliquer comment ça marche vraiment. En surf comme ailleurs, faire une description simple revient malheureusement à faire une description fausse. Je vais tenter ici de faire la description la plus courte, et la moins fausse possible de l’aileron de surf…

La planche est une extension du corps du surfeur, les ailerons sont ses nageoires plongées dans l’eau qui le guident et le propulsent en déviant la trajectoire du flux. Le rôle des ailerons est sous-estimé par beaucoup de surfeurs, c’est pourtant un élément déterminant pour la manœuvrabilité et l’accélération de la planche. Un aileron est une aile qui vole dans l’eau. Il génère des forces de portance et de trainée qui agissent sur l’équilibre de la planche, lorsque le surfeur commence à ressentir cette nageoire active sous sa planche, il accède à un niveau supérieur de connexion avec l’eau, qui amplifie son intuitivité de trajectoire.

Débarrassons-nous immédiatement de quelques idées fausses, comme :

1.    Une grosse vague = de gros ailerons !  FAUX, la surface d’aileron doit diminuer avec la vitesse.

2.    Un aileron proche du rail fait que la planche accroche mieux ! Pas obligatoirement, l’effet de dévers de la planche est plus important qu’avec un aileron au centre, donc le rail accroche moins facilement. (Nous expliquerons cela en détail).

3.    Plus il y a d’ailerons mieux c’est ! VRAI (pour le vendeur), FAUX pour le surfeur, c’est la surface rapportée à son poids et sa puissance de manœuvres qui est essentielle pour choisir la bonne surface d’aileron. Les configurations en quad sont réservées aux surfeurs très puissants et massif dans des vagues très creuses ! un single est souvent plus performant qu’une série d’ailerons, dont les angles d’implantations se contredisent dans les manœuvres.

4.    Un bon aileron est forcément rigide et coupant donc un bon surfeur doit pouvoir se raser de près avec ses ailerons, les ailerons souples sont réservés aux débutants. FAUX ! Demandez aux cétacés, aux albatros et aux navigateurs du Vendée globe, de traverser les océans avec des nageoires, des ailes ou des voiles qui n’ont pas un bord de fuite souple, épousant la trajectoire du flux en sortie de profils, ils vous diront que ce n’est pas des vraies ailes ! Une aile doit orienter le flux sans le perturber !

5.    Le surfeur est un gland, il ne peut pas lire plus des 264 caractères sans images. Ben si vous êtes encore là, cher lecteur, c’est que vous avez déjà dépassé le quota, donc encore une idée fausse de balayée, si vous n’êes plus là cet article ne sert à rien, je ferais mieux d’aller surfer.

Posons maintenant les bases du fonctionnement des ailerons par ordre d’influence en tordant le cou à une dernière idée préconçue, en affirmant que l’élément primordial du fonctionnement de l’aileron de surf, n’est pas l’aileron mais l’endroit où on le place !

 

L'implantation des ailerons 


Influence de la position d’implantation sur la manœuvrabilité 


La manœuvrabilité d’une planche est liée à l’effort à produire pour mettre en rotation la planche et son surfeur suivant un axe donné. Cet effort varie avec la distance séparant le centre de gravité du surfeur du centre de pivotement de la planche. La manœuvrabilité théorique maximale est obtenue lorsque le centre de gravité du surfeur coïncide exactement avec l’axe de lacet (yaw).



Lorsque le surfeur engage un virage radical, il ramène son centre de gravité au niveau du centre de portance global des ailerons, car toute distance l’éloignant de ce point tend à augmenter l’effort nécessaire pour tourner autour de cet axe. Lorsque la rotation est terminée il se replace en avant en recherche de vitesse.

Le placement du surfer à l’arrière vient aligner le centre de gravité du surfeur sur le centre de pivot effectif de la planche, résultant de la position des ailerons. Avancer les ailerons diminue la distance de déplacement avant-arrière à parcourir pour fusionner ces centres, ceci rend la planche plus facile à manœuvrer et relancer.
Mais trop avancer l’aileron dégrade la stabilité de la planche dans les phases rapides. L’appui avant sur le rail immergé génère de l’accélération, mais il doit être compensé par une position reculée des ailerons : Un aileron reculé entraine l’arrière de la planche dans le sens du flux relatif. Il en résulte un alignement automatique de la planche, positionnant l’avant de la planche face au flux, et l’âme (stringer) parallèle à la direction du flux relatif. Ce caractère auto stable est la directionnalité*.

*Définition : caractère directionnel, de ce qui oriente. La directionnalité stabilise la planche et compense la trainée de l’avant de la planche, qui tend à faire remonter le nose vers la crête. Si l’aileron ne réaligne pas l’arrière de la planche dans le flux, la planche se met en travers. Ceci arrive lorsque l’aileron ventile, décroche, ou casse : la planche part en tête-à queue, elle survire.

Avec un aileron bien reculé et immergé, le surfeur peut aller se promener sur le nose sans modifier la direction de la planche. Ce comportement apporte de la sécurité dans les grosses vagues, mais c’est la planche qui commande accrochez-vous et priez pour que la ligne droite soit le bon chemin !

Si on place l’aileron central trop en avant l’excès de manœuvrabilité peut entrainer de l’instabilité contraignant le surfeur à toujours se concentrer sur le contrôle sans pouvoir se reposer sur la directionnalité de la planche…



 

Un compromis doit donc être fait entre manœuvrabilité et stabilité :
Nous retiendrons :

•    Ailerons en avant = manœuvrabilité.
•    Ailerons en arrière = stabilité et directionnalité.


Influence de l’implantation sur le bon fonctionnement de l’aileron 

 



Un bon aileron, mal placé, peut devenir inutile s’il ne fonctionne pas correctement. Une petite précision de vocabulaire est nécessaire :

  • Décrochage : Perte de portance résultant d’un angle d’incidence trop élevé. La couche limite décolle de l’extrados du fait de la variation de trajectoire trop importante imposée par l’incidence excessive. Des recirculations viennent combler la dépression génératrice de portance. L’aileron freine mais ne porte plus, il travaille comme un parachute et plus comme une aile.
  • Ventilation : Aspiration de l’air de la surface au niveau de l’extrados de l’aileron. Lorsque l’aileron est trop proche de la surface, la dépression de l’extrados aspire de l’air et fait chuter la portance. La ventilation apparait aussi lorsque l’angle de roulis est important et fait remonter l’aileron a la surface. Dans ce cas l’aileron ne porte plus, il dérape et provoque la chute du surfeur dans 90% des cas.
  •  Devers : Une planche de surf accroche la paroi de la vague avec son rail, l’aileron doit l’aider dans cette action. Le surfer appuie sur la planche du coté ou il veut accrocher, mais l’aileron peut contredire cette force d’appui en produisant du devers de 2 manières :

o    Dévers produit par la profondeur du point de portance : plus la force de l’aileron est appliquée bas, plus le levier déversant est fort, un centre de portance haut limite le devers. Un grand aileron peut provoquer le retournement de la planche lors de la réception d’un take off un peu raide et départ en travers de vague.
o    Dévers produit par la position de l’aileron : pour enfoncer le rail (moment M), la force d’appui du surfeur (1) doit être appliquée entre le centre de portance de l’aileron et le rail, sinon cette force sera transformée en déversement de la planche, et perte d’accroche du rail. Le surfeur affligé de ce mal doit obligatoirement « graber » pour maintenir son rail dans l’eau.


Les diverses configurations d’implantations peuvent résoudre les problèmes de décrochage, de ventilation, et de dévers.